Biologie  |  Environnement

 

Lauriane Ambrosini, 2004 | Grolley, FR

 

Il est souvent difficile d’identifier l’espèce ou le sexe d’un oiseau auquel appartenait une plume trouvée dans la nature, même avec un livre. Or déterminer la présence d’une espèce rare dans un habitat à l’aide d’un indice de présence indirect, comme une plume, peut permettre la mise en place de mesure spécifique pour préserver cette espèce. Dans ce travail, j’ai cherché à savoir quelle méthode d’identification permet d’obtenir les résultats les plus concluants. Pour cela, j’ai expérimenté deux approches, celle du naturaliste, avec les livres, et celle du biologiste moléculaire, avec l’ADN. J’ai d’abord identifié 28 plumes à l’aide de livres spécialisés. Puis, j’en ai identifié 9 en utilisant des méthodes de génétique. Enfin, j’ai comparé les résultats obtenus via les deux méthodes. Ceux-ci suggèrent qu’elles sont complémentaires.

Problématique

De nombreuses personnes ont déjà tenté de déterminer à quelle espèce appartenait une plume trouvée au sol, mais bien souvent, l’identification du sexe et de l’espèce reste incertaine. Dans ce travail, j’ai donc cherché à savoir si le génotypage grâce à l’ADN est meilleur que les livres spécialisés pour l’identification de plumes d’oiseaux.

Méthodologie

Pour y répondre, j’ai ramassé des plumes dans la nature et, à l’aide de deux livres, ai tenté d’en identifier l’espèce et le sexe. Puis, aidée du Dr. Gwenaël Jacob (UNIFR), j’ai isolé deux gènes chez 9 plumes sélectionnées. Les gènes investigués sont le gène CHD pour le sexage et le gène COI pour l’identification d’espèce. Pour cela, l’ADN a d’abord été extrait des plumes, purifié et amplifié par PCR. Ensuite, j’ai réalisé des électrophorèses pour sexer les échantillons et vérifier que l’amplification par PCR ait bien fonctionné. Enfin, les échantillons ont été séquencés par le laboratoire Microsynth (St-Gall) et les séquences obtenues ont été introduites dans la base de données NCBI.

Résultats

Selon l’identification réalisée avec les livres, la plume n°1 appartenait à une corneille noire, les plumes n°8 et 10 à des pies bavardes, la plume n°12 à une tourterelle turque, la plume n°13 à un pigeon ramier, la plume n°14 à un merle noir, la plume n°16 à un milan noir, la plume n°20 à un moineau domestique et la plume n°28 à un geai des chênes. Je n’ai toutefois pas réussi à identifier le sexe des individus. À cause d’une erreur en laboratoire, j’ai perdu deux échantillons (plumes n°8 et 10) et seuls 7 ont été sexés et séquencés. Les résultats du séquençage confirment la première identification pour les plumes n°1, 12, 13, 14, et 28 (56%). Cependant, la base de données indique que la plume n°16 provenait à la fois d’un milan noir et d’un milan royal. Il n’y a pas de résultat pour la plume n°20, le séquençage ayant échoué. Les résultats du sexage indiquent que les plumes n°1, 12 et 16 appartenaient à des mâles et les plumes n°13, 14 et 20 à des femelles. Le sexage a échoué pour la plume n°28.

Discussion

La comparaison des résultats montre que l’identification dite du naturaliste a plutôt réussi. En effet, 56% des identifications réalisées avec les livres ont été confirmées par le génotypage. L’ADN a fourni un résultat différent uniquement pour la plume n°16. Il indique qu’elle appartiendrait à deux espèces différentes à la fois. Cela s’explique par la grande proximité génétique des deux espèces. Elles sont génétiquement si proches qu’elles ont exactement le même gène COI, ce qui empêche de les différencier uniquement à partir de ce dernier. Toutefois 33% des identifications génétiques ont échoué soit à cause de la qualité du matériel génétique, soit en raison d’une erreur commise en laboratoire. N’ayant pas réussi à identifier le sexe des oiseaux avec les livres, il n’a pas été possible de réaliser une véritable comparaison des deux approches. Cependant, comme le sexage a très bien fonctionné (un échec, la plume n°28), nous pouvons en déduire qu’il est plus efficace de sexer un individu génétiquement qu’à l’aide de livres.

Conclusions

Ce travail a démontré que l’ADN n’est pas infaillible et que parfois les livres sont tout aussi efficaces pour identifier une espèce d’oiseaux à partir d’une plume. Ces analyses génétiques coûtant très cher, il serait parfois plus rentable de recourir à des livres. En revanche, lorsqu’il s’agit d’identifier le sexe d’un oiseau, l’ADN reste bien plus performant. Ainsi, je conclus que le génotypage grâce à l’ADN n’est pas meilleur mais complémentaire aux livres spécialisés pour l’identification de plumes d’oiseaux. Il serait en effet plus judicieux de recourir à la génétique uniquement en cas d’identification douteuse ou pour tenter de l’affiner.

 

 

Appréciation de l’expert

Vincent Grognuz

Cette étude s’inscrit dans les problématiques actuelles de la recherche en écologie. Dans son travail, Laurianne a comparé avec précision deux méthodes d’identification de plumes et a mis en évidence les forces et les faiblesses de chaque pratique. La première, utilisée depuis des décennies, se base sur une identification visuelle. La seconde, se basant sur des techniques modernes, se rapproche du génotypage. Les méthodes et les résultats de cette étude comparative sont très intéressants et devraient être une source d’inspiration pour tout biologiste travaillant dans ce domaine.

Mention:

excellent

Prix spécial «Taiwan International Science Fair (TISF)» décerné par Odd Fellows, Helvetia Loge Nr. 1

 

 

 

Collège St-Michel, Fribourg
Enseignant: Michael Hebeisen