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Leudita Sherifi, 2004 | Granges-paccot, FR

 

Dans un monde intégrant progressivement les IA, pourrions-nous aller jusqu’à remplacer l’homme dans les relations amoureuses ? Afin d’illustrer cette question de l’amour entre un humain et une IA, j’ai utilisé le film HER et l’épisode Be Right Back de la série Black Mirror en montrant ce qui peut limiter l’amour ou lui permettre de se développer. Pour répondre à la question, j’ai réuni plusieurs textes de philosophes qui questionnent l’essence de l’amour.

Problématique

L’amour est présent avec un partenaire ou avec une mère, mais qu’en est-il de ces éléments technologiques que nous côtoyons quotidiennement ? Jusqu’où sont-ils capables de nous remplacer ? Ce travail est là pour questionner la possibilité d’un amour entre un humain et une IA. J’ai développé cette question en proposant une réflexion sur le concept d’amour.

Méthodologie

Pour réaliser ce travail, j’ai choisi une problématique qui posait une question fondamentale liant l’homme au monde virtuel. Je me suis basée sur le livre L’amour et l’Occident. Pour approfondir la définition de l’amour, j’ai utilisé Le Banquet de Platon qui définit l’amour comme manque. J’ai également analysé l’amour à travers la notion de philia à l’aide de textes d’Aristote et à travers les concepts de désir et d’amour chez Spinoza. J’estimais que le film HER et l’épisode Be Right back de Black Mirror pouvaient être mis en lien avec les concepts de philia et d’Eros. Finalement, j’ai abordé l’amour comme processus biologique tel que Lucy Vincent l’analyse avant de confronter les différents arguments sur la possibilité de tomber amoureux d’une IA et de répondre à la problématique.

Résultats

Si l’IA est capable d’ajuster différents qualités et défauts, ce qu’on recherche pourrait être réglé jusqu’à amener une sorte d’altérité choisie. Au contact de l’intelligence artificielle, un sentiment de bien-être peut se développer grâce à la dopamine ou à d’autres messages chimiques, ce qui crée alors une dépendance. En interprétant l’amour comme manque et en constatant que l’humain ne peut jamais réellement posséder l’IA, on se retrouve confronté à l’Eros de Platon, car l’amour se nourrit de l’absence de l’IA. Cependant, la philia d’Aristote est plus convaincante car bien qu’Eros puisse exister, il ne peut durer éternellement. Contrairement à Platon, Aristote estime que l’amour se nourrit de la présence. De même, chez Spinoza, l’amour est défini comme un sentiment de joie accompagné d’une cause extérieure. Dans notre cas la cause extérieure du sentiment de joie est la présence de l’IA. D’un autre côté, le principal problème évoqué dans mon travail était la question de la réciprocité, mais j’ai montré qu’elle n’était pas nécessaire pour laisser place à l’amour. En réalité, nous aimerions ce que l’IA nous apporte puisqu’elle s’adapte à l’être humain sur différents points ou nous rend heureux. Nous pouvons considérer cet amour comme substitutif, mais cela reste de l’amour. Même s’il est encore difficile d’imaginer une telle relation, la banalisation du virtuel et de la place des intelligences artificielles pourrait rendre possible l’amours envers une IA dans un avenir proche.

Discussion

Ce travail m’a confrontée aux préjugés face à la possibilité de relations amoureuses entre une IA et un humain. Cela me semblait compliqué à imaginer, mais j’ai essayé d’être objective et d’imaginer cette possibilité, ce qui m’a progressivement permis de construire une position. J’ai pu illustrer ce type de relation à l’aide d’HER et Be Right Back, mais aussi juger la complexité qu’on rencontre lorsqu’on retrouve trop de philia ou trop d’Eros dans une relation. Tous ces aspects m’ont contrainte de recomposer mon plan, de devoir beaucoup reposer sur mes propres réflexions et de trouver des réponses aux questions qui me tracassaient en m’appuyant sur différentes définitions de l’amour. Le plus complexe aura tout de même été de prendre le plus d’aspects en compte sans en omettre car cela perturberait la crédibilité du projet.

Conclusions

L’analyse des textes sur l’essence et la provenance de l’amour m’ont permis de le définir. Je ne réfute pas la thèse de Platon mais estime que ce type d’amour est éphémère, contrairement à celui que nous propose Aristote. Lucy Vincent amène l’aspect scientifique en présentant le contact au niveau de la biologie humaine, ce qui peut être rapproché de l’amour comme philia dans la mesure où la présence est déterminante dans ce concept. C’est en me basant sur ces textes que j’affirme que l’homme peut tomber amoureux d’une IA.

 

 

Appréciation de l’expert

Yann Grin

La candidate confronte un des plus anciens thèmes de la condition humaine, l’amour, avec un fantasme dont la réalisation semble imminente au XXI siècle, l’intelligence artificielle (IA). Elle pose la question de la possibilité de tomber amoureux d’une IA à partir de deux fictions qui peignent des relations amoureuses entre cette dernière et l’humain. Son exploration passe par une réflexion sur les conditions pour qu’une telle relation amoureuse soit possible. À travers l’analyse de différents concepts d’amour, la candidate se fraie un chemin pour proposer une réponse à cette étrange question.

Mention:

bien

 

 

 

Collège St-Michel, Fribourg
Enseignant: Pierre-Yves Meyer