Physique | Technique
David Surdez, 2003 | Domdidier, FR
Les particules sont les constituants fondamentaux de la matière. Certaines d’entre elles se déplacent librement autour de nous : elles peuvent provenir de la radioactivité, du soleil ou encore du fin fond de l’espace. L’étude de ces particules nous permet de mieux comprendre les règles qui régissent notre univers. Telle est la quête de mon projet.
Problématique
Vous vous en doutez, des particules de cette taille sont invisibles à l’œil nu. Même avec le plus puissant des microscopes électroniques, il est impossible de les voir. Or, il existe une machine appelée «chambre à brouillard» qui, en utilisant une couche de vapeur métastable, permet de former un «écran» à particules. Afin de former cet état, il faut évaporer un alcool dans des conditions bien spécifiques de température, d’illumination, de champ électrique et magnétique, tout cela sans fluctuation de l’air. Si tous ces éléments sont au rendez-vous, il devrait être possible de révéler les particules subatomiques sous forme de trainées de gouttelettes dans la vapeur.
Méthodologie
La plus grande difficulté est d’atteindre la température de -25°C. Ma première approche a été la simplicité : utiliser des modules Peltier. Ce sont des composants électroniques qui créent une différence de température lorsqu’on leur applique un courant électrique. Concrètement, la première machine est constituée de 12 modules Peltier qui refroidissent une surface de 100 cm2, ainsi que tout le reste des composants électriques pour atteindre les bonnes conditions de visibilité des particules. L’appareil fonctionne et permet de dévoiler les particules subatomiques à l’œil nu. Cependant, de nombreux problèmes ont été rencontrés avec ce prototype : les températures ne sont pas constantes, il y a trop de fluctuations de l’air à cause de la chaleur des LEDs qui illuminent la chambre et la surface de l’écran est petite, ce qui rend difficile l’étude des rayons cosmiques. Par conséquent, j’ai mis au point une deuxième version de la chambre à brouillard. Celle-ci utilise un principe beaucoup plus complexe de réfrigération à changement de phases (circuit fermé rempli de propane comprimé à 12 bars). Elle résout tous les problèmes rencontrés avec la première version de la machine. Elle comprend aussi un champ magnétique puissant qui permet d’identifier certaines particules passant dans la chambre et même d’en estimer l’énergie. La surface de l’écran est 8 fois plus grande que celle de la version précédente, ce qui est idéal pour l’étude des rayons cosmiques.
Résultats
Les émissions de 6 isotopes radioactifs contenus dans des échantillons que j’ai collectés ont été observées dans la chambre à brouillard (Radium-226, Radon-220, Thorium-232, Uranium-238, Potassium-40, Américium-241), ainsi que 3 formes de phénomènes impliquant des particules subatomiques (électrons courbés sous l’influence du champ magnétique, création de paires électron/positron et rayons delta émis par collisions entre particules). L’étude des rayons cosmiques a également été possible en observant principalement des muons traversant la chambre. La première chambre à brouillard m’a aussi servi à faire des présentations sur la radioactivité, afin de montrer de manière visuelle ces concepts appris en cours.
Discussion
Les résultats obtenus avec les sources radioactives dans la chambre à brouillard sont cohérents avec la théorie. La chambre à brouillard permet facilement de distinguer les différents types de particules (par ex. les particules alpha laissent une trainée courte et large). Il est possible de déterminer l’activité relative d’un échantillon ainsi que le type de particules émises, là aussi en cohérence avec la théorie (Am-241 émet principalement des particules alpha alors que K-40 uniquement des bêtas).
Conclusions
La chambre à brouillard se glisse parfaitement dans la catégorie «Physique/technique» en mélangeant des concepts d’ingénierie pour la conception et la construction de la chambre avec des phénomènes touchant à la physique des particules, le tout dans une expérience visuelle et intuitive. Le projet a été un grand succès. Dans un premier temps, le but n’a été que partiellement atteint avec la première version, puis largement dépassé avec la seconde. Les problèmes rencontrés ont été nombreux et considérables, mais tous ont un point commun : ils m’ont permis de développer mes compétences en les surmontant. L’ambition de cette aventure m’a poussé à aller toujours plus loin en plongeant dans des domaines que je connaissais à peine.
Appréciation de l’expert
Dr. Philipp Azzarello
On ne peut qu’être frappé par le parcours enthousiasmant de M. Surdez, qui a développé une chambre à brouillard afin de pouvoir observer des phénomènes de désintégrations radioactives et de rayons cosmiques avec deux installations construites de ses mains. Il s’est également attelé à la recherche d’échantillons accessibles à tous. Nul doute qu’il continuera d’améliorer son appareillage, et qu’il se donnera de nouveaux défis pour étudier d’autres phénomènes naturels. Son travail remarquable inclut curiosité, créativité, et persévérance. Précieux ingrédients pour un futur chercheur de talent !
Mention:
excellent
Prix spécial «Mostratec» décerné par les soutiens de Science et jeunesse
EPAI Ecole professionnelle artisanale et industrielle, Fribourg
Enseignant: Cédric Frachet