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Amélie Halter, 2005 | Männedorf, ZH

 

La pandémie de Covid-19 a souligné notre unité en tant qu’humanité et l’importance des contacts humains. Ce travail explore la signification du toucher dans diverses cultures ainsi que sa place essentielle dans les pratiques thérapeutiques et affectives occidentales. Une seconde partie propose une enquête explorant les répercussions du Covid-19 et du manque de contacts physiques sur des adolescents en période de transformation corporelle et de développement personnel.

Problématique

Outre l’exploration du premier de nos sens qu’est le toucher, ce travail envisage l’impact de la distanciation imposée par la crise sanitaire sur le développement émotionnel et social des adolescents. Nous cherchons à comprendre si cette restriction des contacts physiques a eu des répercussions négatives sur la formation de leurs relations intimes et sociales.

Méthodologie

De nombreux ouvrages explorent le toucher en tant que sens de la perception, mais peu l’abordent sous l’angle du contact et de l’intimité . Plusieurs études publiées post-pandémie ont néanmoins guidé nos hypothèses. Nous avons élaboré un questionnaire de 18 questions, validé par des psychologues et adressé à près de 200 lycéens âgés de 11 à 21 ans. Son objectif était de collecter des données sur la fréquence et l’absence de contact physique pendant la pandémie, ainsi que sur les changements de ressenti et de comportement après celle-ci.

Résultats

Les embrassades et poignées de main sont les contacts physiques principaux pour 90% des interrogés, suivis par les baisers (45%) et les rapports sexuels (15%). Durant la pandémie, du fait que 80% des jeunes ont respecté les mesures de protection, les trois principaux types de contacts ont diminué de moitié. Plus d’un tiers des jeunes ont déclaré ne plus avoir aucun contact physique, tandis que les contacts sexuels ont légèrement augmenté. Avant la pandémie, les filles signalent des contacts plus fréquents (6-8 sur une échelle de 10) que les garçons (5-7), alors que durant celle-ci, leur fréquence tombe à 2-3 pour les filles, mais se maintient à 3-4 pour les garçons, gardant entre eux un contact ludique et provocatif. Nous concluons que les filles, ayant eu davantage de contacts physiques avant la pandémie et moins que les garçons pendant celle-ci, ont été plus affectées par l’isolement. La perception du manque de contact varie : pour plus d’un tiers des garçons, le manque est peu ressenti voire inexistant (0-2), il est plus marqué pour les filles (5-8). Par ailleurs, si la communication digitale a occupé une place centrale pour tous les jeunes durant le confinement, ce fut davantage le cas pour les filles (7-8) que pour les garçons (6-8). Ce constat surprenant souligne le besoin accru des filles de compenser le manque de contact social, tandis qu’une partie des garçons s’est tournée vers le sport. Autre résultat inattendu, les filles ont déclaré n’avoir « plutôt aucune gêne » lors de contacts physiques avant la pandémie, alors que les garçons ont mentionné une « gêne partielle ». On peut supposer que le contact physique est constitutif de l’assurance des filles dans la relation à l’autre. Ainsi, la « très grande gêne » qu’elles ont ressentie pendant la pandémie, ainsi que le maintien par la suite d’une « gêne partielle », deux fois plus fréquente que chez les garçons, suggère que la distanciation a entravé le développement de leur identité. Au final, près d’un tiers des jeunes ont observé un impact post-pandémie négatif sur leurs relations interpersonnelles, entraînant une attitude plus distante sur le plan social.

Discussion

Aujourd’hui, la mesure est prise de l’impact des mesures sanitaires sur une génération en plein élan vital. Notre enquête révèle l’importance cruciale des contacts physiques surtout pour les filles, qui en sont moins gênées que les garçons. Le respect accru des mesures de distanciation a amplifié leur vide émotionnel, les poussant vers les réseaux sociaux. Après la pandémie, leur gêne persistante a altéré leur comportement social, soulignant le rôle crucial du toucher dans leur développement identitaire.

Conclusions

Ce travail explore le ressenti moral et les changements comportementaux des jeunes pendant la pandémie, en les interrogeant sur l’avant et l’après Covid. Il souligne l’importance prédominante des relations amicales ou familiales sur les relations sexuelles, la souffrance accrue des filles pour qui le toucher de l’autre constitue un geste existentiel, la gêne relative des garçons à l’égard du contact physique, qui fait que le confinement les a peu touchés, et l’importance du monde numérique pour les deux sexes.

 

 

Appréciation de l’expert

Gilles Bangerter

Le travail d’Amélie Halter explore l’impact des mesures de distanciation physique lors de la pandémie de COVID-19. Elle fixe son regard sur les adolescent·e·s et jeunes adultes. En réalisant une recension des écrits scientifiques sur l’importance du contact physique dans le développement de l’être humain, elle aborde l’importance de ceux-ci. Elle précise enfin la problématique en vérifiant par un questionnaire très complet comment cette population a modifié ses comportements et met en évidence le potentiel délétère d’une privation de contacts physiques à ce stade de leur développement affectif.

Mention:

bien

 

 

 

Freies Gymnasium Zürich
Enseignante: Madame Dr. Fabienne Douls Eicher