Biologie  |  Environnement

 

Lucie Urweider, 2005 | Vevey, VD
Véronique Van Nunen, 2006 | Prilly, VD

 

Le génépi des neiges (Artemisia nivalis, Astéracées) est une espèce rare et endémique de Suisse, connue uniquement de la région de Zermatt. Décrite en 1919 par Josias Braun-Blanquet, elle est souvent apparentée au génépi noir (A. genepi), duquel elle ne diffère que peu.
Lors de ce travail, nous nous sommes intéressées à l’origine évolutive de cette espèce, c’est pourquoi nous avons reconstruit une phylogénie des armoises alpines, basée sur deux régions des génomes nucléaire et chloroplastique. Les extractions et amplifications par PCR ont été réalisées au gymnase, alors que le séquençage, selon la méthode Sanger, a été effectué par un tiers.
Contrairement à ce que laissait présupposer la morphologie, la plus proche parente d’Artemisia nivalis n’est pas A. genipi, mais A. eriantha (le génépi laineux). Cela est d’autant plus surprenant que ces deux espèces sont morphologiquement et écologiquement bien différentes. A.nivalis pousse exclusivement sur les schistes calcaires du Rothorn à Zermatt, alors qu’A. eriantha pousse sur des roches siliceuses dans les montagnes du sud de l’Europe.
Sur la base de nos résultats et de la littérature existante, nous proposons un scenario plausible quant à l’origine d’A. nivalis. Notre étude confirme, une fois de plus, le rôle important des refuges glaciaires du Pléistocène de la région de Zermatt.

Problématique

La problématique de ce TM a été de déterminer quelle est la position phylogénétique d’A. nivalis, si elle est aussi proche d’A. génépi que le laissent penser leurs fortes similitudes morphologiques. Mais aussi de déterminer ce qui pourrait expliquer la situation écologique particulière d’A. nivalis, la raison pour laquelle sa répartition, à Zermatt uniquement, est si restreinte.

Méthodologie

Pour ce faire nous avons utilisés des échantillons d’A. nivalis qui nous ont été procurés par l’université de Neuchâtel. Nous avons extrait son ADN afin de faire une PCR sur les régions ITS1 et ITS2 de l’ADN ribosomique. Les produits de la PCR ont pu être utilisés afin de faire un séquençage avec la méthode Sanger.
Les séquences d’ADN complémentaires (ITS1/ITS4 et c/f) de nos échantillons ont été assemblés sur Geneious Prime. L’alignement des séquences a ensuite été effectué avec l’outil Clustal Omega 1.2.3 avec l’option ‘’fast clustering (mBed algorithm)’’, également sur Geneious Prime, puis retouché à la main pour corriger les erreurs d’alignement.

Pour l’analyse phylogénétique, deux méthodes de reconstruction ont été effectuées : la méthode d’inférence bayésienne de MrBayes et celle de ‘’Maximum Likelihood’’.

Résultats

Nous avons donc découvert que A. nivalis partage son l’ancêtre le plus proche non pas avec A. génépi, comme nous le laissait supposer leurs ressemblances, mais avec A. erientha.

Discussion

A. erientha est une espèce se différenciant d’A. nivalis tant d’un point de vue morphologique qu’écologique. Avec toutes nos informations, nous pensons que l’ancêtre commun de ces deux espèces a eu des populations qui ont survécue dans des endroits différents durant les périodes du Pléistocène. En effet, certaines se seraient réfugiées dans l’été Sud tandis que d’autres se seraient retrouvé dans le nunatak de la vallée de Zermatt.
Le flux de gène entre ces populations se seraient alors arrêté. Ces populations se seraient donc par la suite différenciées. Celles du Sud ont pu se disperser à la fin du Pléistocène à nouveau sur divers sommets européens et auraient données A. erientha, tandis que celle des Rothorns serait restée emprisonnée par la chaîne de montagne qui entoure la valée et serait devenu A. nivalis.

Conclusions

Nos observations ajoutés aux résultats obtenus nous ont permis de proposer un scénario probable concernant la répartition actuelle d’A. nivalis. Cette plante serait effectivement une espèce distinctes des autres armoises qui se serait retrouvée bloquée sur les Rothorns de la vallée de Zermatt, aurait survécu à cet environnement unique en son genre et s’y serait adaptée pour être l’espèce qu’elle est aujourd’hui.

 

 

Appréciation de l’expert

Dr. Sébastien Bruisson

Véronique van Nunen et Lucie Urweider ont réalisé une étude sur l’origine évolutive du génépi des neiges (Artemisia nivalis) et se sont intéressées à l’histoire ainsi qu’aux facteurs géologiques qui expliquent sa distribution actuelle. Elles ont effectué un travail rigoureux et une analyse scientifique de grande qualité qui ont permis d’établir un arbre phylogénétique consensus. Elles ont également réalisé un travail de recherche bibliographique poussé, qui a permis d’établir un scénario convainquant concernant la répartition de la population actuelle du génépi des neiges.

Mention:

excellent

Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL)

 

 

 

Gymnase de la Cité, Lausanne
Enseignant: Jonathan Kissling